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La Libre pensée interpelle le CSA sur les graves dérapages d'une émission de France 5


Christian Eyschen, vice-président de la Fédération nationale de la Libre Pensée (FNLP), vient d'écrire une lettre ouverte à Olivier Schrameck, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) pour l'interpeller sur les graves dérapages survenus sur la chaîne publique France 5, dans l'émission "C dans l'air" du 24 décembre dernier.

Lors de cette émission consacrée à la polémique sur les crèches, le débat a caricaturé de façon outrancière pour ne pas dire diffamatoire les positions de la FNLP, qui n'a pas pu répondre à ces attaques infondées, étant donné que la totalité des invités sur le plateau étaient du côté des adversaires des positions de la FNLP sur la laicité.

Voici le courrier adressé à M. Schrameck le 26 décembre.

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Monsieur le Président,

La Fédération nationale de la Libre Pensée s’adresse à vous par ce moyen un peu inhabituel pour vous alerter sur un comportement que nous considérons comme problématique par rapport à la déontologie et au pluralisme qui devraient régner particulièrement dans l’audiovisuel, notamment public.

Lors de l’émission « C’ dans l’air » du mercredi 24 décembre 2014, qui traitait de la question des crèches dans les bâtiments officiels de la République, le journaliste Axel de Tarlé a commencé son propos en indiquant « Les libres penseurs veulent interdire les crèches et maintenant aussi les sonneries de cloches ». En clair, on a affaire à des liberticides.

Dans le reportage qui suit, le journaliste met sur le même plan le recours juridique de la Libre Pensée au Tribunal administratif de Melun sur la présence d’une crèche chrétienne dans les locaux municipaux (qui constitue une violation de l’Article 28 de la Loi de 1905) et une simple lettre individuelle d’un libre penseur sur la gêne occasionnée par la sonnerie incessante de cloches. Le cadre est ainsi posé pour une attaque en règle contre la Libre Pensée.

C’est dans l’air... surtout dans l’air du Vatican

Sur le plateau, un seul sujet : dénoncer la Libre Pensée. Les intervenants du débat sont : Michel Cool, un spécialiste du christianisme, ancien rédacteur en chef de La Vie (catholique), actuellement chroni- queur au Jour du Seigneur sur France 2 et Radios Chrétiennes Francophones. Autre intervenant, Jean-François Colosimo, Président des Éditions (catholiques) du CERF, il enseigne à l’Institut Saint-Serge la théologie byzantine. Intervenant suivant, Raphaël Draï, spécialiste de la loi hébraïque. Dernière intervenante, Cynthia Fleury, membre du Comité consultatif national d’Éthique dont visiblement la laïcité n’est nullement la spécialité, c’est le moins que l’on puisse dire.

Le décor est ainsi planté pour le procès. Un seul problème : si les Inquisiteurs religieux sont bien là, on n’a pas invité l’accusée. La Libre Pensée est totalement absente du débat, elle ne peut répondre. Et tous les intervenants saluent l’action passée de la Libre Pensée, mais condamnent son action d’aujourd’hui. Un participant déclare : « Ils sont minoritaires ». Avec quel instrument cet Inquisiteur peut-il mesurer qui est majoritaire et qui est minoritaire ? À l’aune de son propre point de vue ? Les « minoritaires » se ver-raient-ils interdire désormais le droit à l’expression de leurs opinions en France ? Rappelons que la Loi de 1905 est ultra majoritaire plébiscitée par les citoyens. Nous avons constaté que l’ensemble des parti- cipants se prononçait pour la Loi de Séparation des Églises et de l’État, notamment son article 28, à condition qu’il ne soit pas vraiment appliqué. Qui est minoritaire ?

Sommes-nous au pays de Voltaire ou dans celui de Torquemada ?

Pendant près d’une heure, un long réquisitoire va être fait contre la Libre Pensée et les libres penseurs sans que ceux-ci puissent, à aucun moment, répondre et se défendre. Les pires bassesses vont être dé- versées en toute impunité sans que la Libre Pensée puisse les démentir. C’est quand même une curieuse déontologie et une conception du débat pluraliste qui rappellent celles des pays totalitaires.

On assiste, par ailleurs, à un ahurissant déchaînement de l’épiscopat catholique (Messieurs Vingt- Trois, Di Falco Leandri et Podevin, notamment) qui fulminent contre la Libre Pensée. On nous affuble de toutes les calomnies et de toutes les injures. Notre combat serait « dérisoire, inutile, dépassé, stérile ». Mais, alors la question se pose : qui organise ce tintamarre médiatique, sinon l’Église catholique et ses partisans ? Il y a des condamnations qui sont des décorations (en tout cas pour la Libre Pensée), on pourrait même penser à Coluche et à son célèbre « c’est la lutte du Pot de vin contre le pot de terre ».

Mais cela commence à avoir des conséquences assez graves : la vitrine de notre librairie qui est au Quartier latin (et non dans les quartiers riches, dixit le journa- liste de la Cinq) a été brisée une nou- velle fois. Particulièrement visée : l’affi- chette qui souhaitait un « Joyeux Noël païen ».

Les réseaux internet débordent de messages de haine, d’injures, d’insultes et de menaces de mort à notre encontre. Un mouvement catholique appelle à une nouvelle croisade contre les libres penseurs. Des libres penseurs voient leurs photos et leurs adresses divulguées sur internet en appelant à un véritable pogrom contre eux.

Nous avons déposé des plaintes, elles seront suivies d’effet.

La Fédération nationale de la Libre Pensée le dit clairement : elle tient pour responsables moralement, politiquement et pénalement tous ceux qui organisent ces campagnes. Il n’y a pas que Civitas ou le Parti chrétien-démocrate de Christine Boutin qui sont à la manœuvre en la matière. Nous avons les preuves de ce que nous avançons et les fournirons à la Justice quand il le faudra.

Qui organise la division et la polémique ?

Monsieur André Vingt-Trois, archevêque de Paris de son état clérical a demandé à ses ouailles le 15 août 2012 (fête de la « Vierge Marie ») de se réapproprier la sphère publique, car pour lui la religion n‘est pas une affaire privée. En conséquence, des secteurs entiers de l’Église catholique ont battu le pavé, no- tamment à l’occasion du Mariage pour tous.

C’est l’Église catholique, et personne d’autre, qui a décidé de faire, de l’affaire d’une simple décision d’un tribunal administratif sur la crèche au Conseil général de Vendée, une affaire nationale et même internationale. Ce n’est pas la première fois qu’un tribunal administratif prend une telle décision, sans que pour autant, on connaisse un tel traitement médiatique. Et l’on a vu, de l’extrême droite au Parti so- cialiste, la course à l’échalote électorale et politicienne pour se gagner les faveurs de l’épiscopat.
L’affaire des crèches chrétiennes dans les bâtiments de la République est un moyen pour l’épiscopat de tenter d’investir à nouveau la sphère publique d’où la Loi de 1905 l’avait écartée. C’est parce que l’Église catholique a cette volonté cléricale (au sens premier du terme) de redominer la société, notam- ment par le biais de ses symboles religieux, que l’affaire des crèches chrétiennes a pris une telle am- pleur. Et il s’est trouvé naturellement des « idiots utiles » de droite comme de gauche pour prêter leur concours à cette opération cléricale.

Cette affaire n’est donc pas « ubuesque, clochemerlesque », elle est symptomatique d’un débat séculaire que le libre penseur Victor Hugo avait ainsi formalisé : « Ce que nous voulons est l’État chez lui, l’Église chez elle ». C’est là la véritable explication de ce tintamarre médiatique. Certains, et en premier lieu, l’Église catholique, veulent que l’Église soit partout et qu’il n’y ait plus de séparation des Églises et de l’État. Il s’agit, pour la Libre Pensée, de défendre la Loi de 1905.
Force est de constater qu’il y a aussi dans cette affaire des objectifs internes au sein de l’épiscopat. Tous les évêques ne s’alignent visiblement pas derrière la crosse d’André-Vingt-Trois. Il y a fort à parier que ceci n’est pas non plus sans rapport avec ce qui se passe au sein de la Curie romaine, plus que malme- née par le pape François.

Monsieur le Président du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel,

Si nous avons été longs, c’est pour vous expliquer en détail ce qui nous semble en jeu dans cette affaire de l’émission « C’ dans l’air ». On aurait pu attendre d’une telle émission sur une chaîne du service pu- blic une déontologie plus conforme aux principes du pluralisme d’opinion.
Nous souhaiterions en conséquence que vous rappeliez les responsables de cette émission à leurs obli- gations déontologiques. Nous sommes prêts, quant à nous, à venir sur leurs plateaux pour faire valoir notre Droit de réponse.

Dans l’attente de votre réponse, veuillez recevoir l’expression de nos meilleurs sentiments et l’expres- sion de notre profond attachement à un service public républicain de l’audiovisuel.

Christian Eyschen, Vice-Président de la Libre Pensée

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