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Crèches chrétiennes dans les bâtiments de la République : Rendre des arrêts ou rendre des services ?

La Fédération nationale de la Libre Pensée, qui est à l’origine de la loi du 9 décembre 1905 de Séparation des Eglises et de l’Etat, entend tout faire pour faire respecter la laïcité de l’Etat. C’est pourquoi, elle est à la source des recours contentieux contre les décisions de collectivités publiques qui imposent la présence de crèches chrétiennes dans les bâtiments de la République. Elle entend aller jusqu’au bout de cette affaire et épuiser toutes les voies de recours possibles.

 

 

Les choses sont pourtant simples 

 

La République est laïque et elle assure la liberté de conscience de tous les citoyens et citoyennes et de chaque citoyenne et citoyen. C’est pourquoi « l’Etat s’arrête où commence la conscience », selon la belle formule de Francis de Pressensé. La République est neutre en matière métaphysique. Pour respecter la liberté de conscience de nos concitoyens, elle ne doit afficher aucune préférence religieuse. 

 

Même un esprit étroit, réactionnaire et xénophobe, de quelqu’un concourant à une primaire présidentielle, devrait pouvoir comprendre cela. Tel ne semble pas être le cas aujourd’hui, car derrière « l’affaire des crèches », il y a bien autre chose. Il y a la volonté de quelques croisés en mal de mise à sac et de prise de Jérusalem, « pour bouter le Sarrazin hors de France », d’instituer une nouvelle guerre de religions dans notre pays.

 

En effet, comment peut réagir un de nos concitoyens d’origine arabo-musulmane, quand il assiste à une campagne hystérique pour traquer « tout signe de culture musulmane » (voile, burqa, burkini, main de Fatma) dans un domaine où il devrait être librement autorisé, puisqu’il ne dépend pas de la sphère publique que régit le principe de laïcité ;  alors que dans les endroits où la laïcité devrait s‘appliquer,  à savoir  les bâtiments de la République, on autoriserait la présence de crèches chrétiennes, dont même un esprit simplet ne peut nier qu’il s’agit d‘un symbole chrétien ?

 

On voudrait inciter à des affrontements communautaristes qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Il est vrai que pour justifier « l’état d’urgence permanent », rien de vaut une atmosphère de guerre civile entre « communautés religieuses ».

 

Que va-t-il se passer maintenant juridiquement ?

 

Devant la cacophonie juridique instituée par des décisions d’instances de justice administrative qui, sur la base de mêmes faits en interprétant les mêmes textes de loi, aboutissent à des décisions contradictoires, on attend du Conseil d ‘Etat qu’il remettre de l’ordre dans le chaos juridique et qu’il fixe une ligne de droit.

 

C’est donc avec un certain étonnement que la Libre Pensée a pris connaissance des conclusions du Rapporteur au Conseil d‘Etat qui préconise de casser les deux arrêts de Cour d’appel administrative et de rejuger les affaires. En matière footballistique, c’est remettre la balle au centre et demander que le match soit rejoué. Il n’y a donc objectivement aucune raison de penser que le trouble juridique cessera, puisqu’on recrée les conditions de son existence.

 

Par ailleurs, conditionner la présence de crèches chrétiennes dans les bâtiments de la République en demandant qu’elles ne soient pas « religieuses », c’est faire un tour de force qu’aucun magicien ne pourrait faire : une crèche chrétienne est un symbole religieux : Marie,  Joseph, Jésus sont des personnages du Nouveau-Testament chrétien. La discussion reste ouverte sur l’âne et le bœuf.

 

La solution de sagesse consisterait à rappeler l’esprit et la lettre de la loi de 1905 et d ‘indiquer, comme l’a fait le vadémécum de l’Association des Maires de France : au nom de la laïcité, les crèches chrétiennes n’ont pas leur place dans les bâtiments de la République, maison commune de TOUS les citoyens, quelque que soient leurs opinions religieuses ou non-religieuses.

 

Il existe, quand même, suffisamment d‘endroits où l’Eglise catholique peut mettre ses crèches, à commencer par ses églises, cela pourrait même y amener le public qui semble lui faire défaut. L’adage populaire ne dit-il pas : chacun chez soi ? Ce que Victor Hugo avait traduit par la formule : l’Etat chez lui, l’Eglise chez elle !

 

La Laïcité ne peut être à géométrie variable selon la religion à laquelle elle s’applique


Paris, le 21 octobre 2016

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